Bien sûr ils ne sont pas tous explorés lors de chaque visite au Sénégal.
Cette réserve, d’une surface de 700 ha (7 km2), couvre essentiellement la lagune de la Somone ainsi qu’une étroite bande de terre ferme et de sable à sa périphérie.
La lagune se situe sur la Petite Côte, à 77 km de Dakar, au niveau de l’estuaire de la rivière la Somone. Cette rivière n’alimente plus la lagune que très partiellement, vu son débit très faible en dehors de la saison des pluies. C’est surtout la marée qui la remplit, puis la vide partiellement par une passe d’une dizaine de mètres de large sur la côte Atlantique. La lagune est bordée par 4 villages : au Nord, d’Ouest en Est Guerew ou Guéreo, village de pêcheurs Lebou, puis Thiafoura et Soro Khassaf, deux villages Sérères aux activités agricoles, et au Sud La Somone ou Somone, commune qui n’a été individualisée qu’en 2008 et vit en bonne part du tourisme, et pour le reste de la pêche, l’agriculture, et en ce qui concerne la communauté Peuhl de l’élevage.
La création de la Réserve, et la richesse actuelle de son milieu naturel sont à mettre au crédit d’un groupe de femmes de ces 4 villages qui, constatant l’épuisement des ressources naturelles de la lagune (particulièrement en poissons et huitres qui s’y développaient naturellement par le passé) et sa probable relation avec une très forte dégradation de la mangrove (intensément coupée pour en faire du bois de chauffe), ont décidé de régénérer cette mangrove en replantant des dizaines de milliers de propagules (sorte de fruits de la mangrove qui se fichent dans le sable et génèrent de nouvelles pousses). Ces femmes ont ainsi ressuscité la végétation originelle, dont les racines constituent une nurserie pour des myriades d’êtres vivants, particulièrement les petits poissons (qui grâce à la protection que leur offre la densité de ses racines deviendront grands !), les mollusques, les crabes, etc… La mangrove contribue également à protéger la côte de l’érosion créée par les vagues et autres courants. Chaque année, les enfants des écoles des 4 villages gérant la RNICS sont invités à repiquer à leur tour des pieds de mangrove élevés en pépinière. Ils contribuent ainsi eux aussi à la propagation de cette zone végétale capitale pour le maintien de la biodiversité de leur lagune.
A la demande de ces femmes, et pour objectiver la volonté du gouvernement Sénégalais d’accompagner les populations locales dans la gestion de leurs ressources naturelles, le conseil rural de Sindia, dont dépendent les 4 villages, a créé cette première Réserve Naturelle d’intérêt Communautaire du Sénégal , qui est toujours gérée principalement par les populations locales, avec l’aide d’un Conservateur nommé par l’Etat, assisté par quelques agents de parc.
La Réserve peut être visitée moyennant un droit d’entrée de 1500 FCFA (2,3€), auquel il faudra ajouter l’écot d’un piroguier si l’on souhaite faire le tour de la lagune sur son embarcation (très recommandé). Ce tour de la lagune passe traditionnellement par le Baobab sacré, encore célébré chaque année par une procession des villageois. Il s’agit d’un arbre nain qui est couvert de coquilles de coques, coquillages bivalves aussi appelés bucardes qui poussent en abondance dans la lagune, et qui, accrochées à ses branches par des humains, représentent autant d’ex-votos ou de rites accomplis pour obtenir la réalisation d’un souhait.
Il est possible de mettre pied à terre sur l’ilot du Baobab sacré pour en faire des photos ou des selfies ! (voir photos plus loin). A noter que c’est aussi l’entassement de ces coquilles qui est à l’origine des quelques autres ilots coquillers qu’on peut observer dans la lagune. Par le passé, en effet, ces coquillages étaient consommés en abondance par la population qui en jetait les coquilles dans des endroits dévolus où leur entassement a créé ces ilots. Les baobabs adorant le calcaire, on en trouve souvent qui poussent sur de tels ilots coquilliers. Ces ilots sont aussi des reposoirs très appréciés des spatules, pélicans, et autres aigrettes.
On peut également pour ce prix visiter le Sentier Ecologique que le couple Thèron a fait aménager à ses frais dans la mangrove en 2011. Cheminer sur ce sentier de 1200 m permet de découvrir la mangrove de l’intérieur, sa physiologie, son rôle protecteur, sa faune et sa flore, à l’aide de panneaux informatifs clairs. Le sentier aboutit à un mirador surplombant une large trouée dans la mangrove, occupée par un banc de sable sur lequel se reposent souvent de nombreux oiseaux. J’y ai souvent vu, par exemple, jusque plus de 300 Pélicans blancs rassemblés sur le sable.
172 espèces d’oiseaux ont été identifiées dans cet écosystème estuarien , si l’on inclut les visiteurs rares. Certaines sont sédentaires, mais un grand nombre sont des migrants d’origine Paléarctique, qui arrivent principalement d’Europe à partir du mois de Septembre, pour y retourner à partir du mois de Mars. Le roi de la lagune, par sa prestance et son comportement de pêche impressionnant, est le Balbuzard pêcheur, qui vient d’Europe du Nord et y hiverne en nombre important. Les spatules blanches, qui comportent de nombreux individus se reproduisant en Europe et d’autres sur le Banc d’Arguin, en Mauritanie, sont un autre sujet de curiosité. On peut aussi observer couramment sur la lagune Milans noirs et Milans à bec jaune, Pélicans Blancs et Pélicans Gris, 4 espèces de Hérons (Cendrés, Striés, Huppés et Garde-Bœufs), 3 variétés d’aigrettes, de nombreux limicoles (Barges, Courlis, Chevaliers, Combattants, Bécasseaux), et un grand nombre de Laridés (Sternes, Mouettes et Goélands) (voir sur Observado les relevés de nos décomptes).
On peut aussi y observer des mammifères comme les Loups du Sénégal (Senegalese wolf, Canis anthus anthus), appelés localement Chacals car de morphologie assez proche de celle du chacal doré Eurasien (Canis aureus) dont il diffère cependant génétiquement. Plusieurs dizaines vivent dans la réserve. On peut aussi voir à sa périphérie et dans la brousse avoisinante des singes Patas ou singe rouge (Patas, Erythrocebus Patas), et des Rats Palmistes ou Ecureuils fouisseurs (Ground squirrel, Xerus Erythropus) , deux espèces plus abondantes dans la brousse. Mais en 10 années de fréquentation assez régulière nous n’y avons jamais vu les singes verts (Green monkey, Cercopithecus aethiops), Mangoustes à queue blanche (White-tailed mongoose, Ichneumia Albicauda), Tortues marines et Varans du Nil (Varanus Niloticus) annoncés dans certains guides. Ces animaux ont peut-être été éliminés par les nombreux chiens abandonnés qui fréquentent aussi la Réserve et se nourrissent en bonne part de ses oiseaux, et probablement aussi de ses mammifères et reptiles.
La topographie de la lagune (multiplicité des plans d’eau et des plages sableuses qui se découvrent à marée basse, hauteur de la mangrove qui les cloisonne et ne permet pas une observation globale des oiseaux volants, ni de ceux qui se reposent sur le sable, rend très difficile un comptage précis de l’ensemble des Balbuzards Pêcheurs qui y séjournent. Le comportement de ces oiseaux permet toutefois une estimation semi-quantitative. Ils pêchent en début de matinée, puis mangent leur poisson, ce qui peut leur prendre plus d’une heure. Pour ce faire, quelques-uns s’éloignent dans la brousse, où ils s’installent au sommet d’un grand baobab. Mais, repérés de loin, ils y sont souvent assaillis par d’autres oiseaux qui cherchent à leur dérober leur poisson (autres Balbuzards, Corbeaux Pie, Hérons Cendrés etc….). De ce fait la plupart s’installent plus simplement sur une zone de sable découvert où ils peuvent également être dérangés par d’autres oiseaux (outre ceux déjà cités, Milans noirs, Aigrette des Récifs, parfois Courlis ou autre limicole), mais ils contrôlent plus facilement les pillards sur ce type de terrain. Ensuite ils se reposent sur le sable jusqu’au milieu de l’après-midi.
En milieu de journée, on peut ainsi voir quelques Balbuzards isolés sur toutes les zones sableuses de la lagune, mais la plupart sont réunis à quelques mètres les uns des autres sur une étendue sableuse dégagée s’étendant sur 1200 m à l’extrémité Est de la lagune (voir carte Google), et sur laquelle on peut alors en compter simultanément jusque 50 ou plus en Janvier ou Février, mois où leur présence est maximum. Pendant nos séjours au Sénégal, nous effectuons des « comptages des Balbuzards pêcheurs de la Lagune Est » plusieurs fois par semaine entre 12h et 14h, dans la mesure où le chiffre obtenu nous semble un index relativement fiable de l’abondance de Balbuzards Pêcheurs séjournant sur la lagune. Nous en rapporterons les résultats sur ce site. En tous cas on peut conclure qu’il y en a au moins le nombre des individus comptés simultanément sur cette bande de sable. En fait certainement un peu plus, car quelques-uns se reposent sur d’autres zones sableuses, incluant celle qu’on peut observer à marée basse à partir du mirador du sentier écologique, quelques autres le font perchés sur des arbres de la brousse, et les pêcheurs infructueux sont probablement toujours en quête de pitance au-dessus de l’eau !
L’abondance des Balbuzards, comme celle des autres oiseaux, est d’autant plus importante à surveiller que le nouvel aéroport de Dakar a débuté son activité fin 2017 à 15 km de la RNICS, et que, de façon tout à fait inattendue pour une Réserve Naturelle, des gros porteurs la survolent maintenant jour et nuit, le dérangement qu’ils causent sur leur trajet pouvant constituer une menace pour la faune de la lagune. De tels comptages réguliers permettront de mieux appréhender leur éventuel impact.
Des observations ont été faites en pirogue le 23 Octobre pendant une sortie de 2 heures sur la lagune avec inventaire du site (27 espèces d’oiseaux). D’autres ont été faites quasi quotidiennement à pied et en voiture sur le pourtour de la lagune (5 espèces d’oiseaux supplémentaires et 2 espèces de mammifères).
Présentation du site
Nous entendrons sous ce terme la zone de brousse laissée à l’état sauvage ou cultivée à la saison des pluies entourant le territoire de la Réserve Naturelle d’Intérêt Communautaire de La Somone (RNICS). Elle englobe une partie des territoires des communes de Somone, Guéreo, Thiafoura, Sorro Khassab et Ngékokh (voir la carte Google). Dans les parties non cultivées, ces zones sont occupées par une brousse faiblement arbustive ou arborée (principalement Baobabs et acacias, et quelques palmiers) légèrement surélevée par rapport au niveau de la mer. Une partieimportante de cette brousse est cultivée, mais moins de 6 mois par an. Les cultures sont entreprises à la saison des pluies (principalement mil, largement consommé par les granivores, arachide, et de plus en plus maïs) et récoltées avant la fin de l’année. A partir de Novembre, les bergers Peulh sont autorisés à faire paitre leurs troupeaux dans les champs cultivés, ainsi que dans la brousse avoisinante, et vaches et chèvres ont vite fait de consommer l’herbe relictuelle, laissant la terre à nu. Les cultures fruitières tendent aussi à se développer (principalement mangues et agrumes), mais les vergers sont généralement protégés par des enclos de parpaings.
La brousse de Somone et des villages avoisinants est traversée par quatre accidents importants :
1. la rivière Somone , entourée d’une mince forêt galerie,
2. une forêt de baobabs , qui se prolonge par celle qui traverse la Réserve de Bandia. Dans ce type de forêt, les arbres ne sont pas serrés les uns contre les autres comme dans nos forêts Européennes. Ils sont séparés par des intervalles de 10 à 50m qui peuvent être occupés par des champs. Cette fprêt n’en est pas moins spectaculaire.
3. Depuis peu la partie terminale de l’autoroute Dakar-Mbour, qui sera ouverte début 2019 et traverse elle-même la forêt de Baobabs.
4. Des couloirs aériens desservant le nouvel aéroport de Diass , ouvert depuis Décembre 2017. Leur trafic est déjà relativement important (1.300.000 personnes transportées au cours de la première année), et devrait s’accroitre régulièrement car cet aéroport doit devenir un Hub pour toute l’Afrique de l’Ouest. Les avions volent relativement bas dans ces couloirs car l’aéroport n’est distant que de 10 à 20 km selon les endroits.
Eu égard à l’implantation de cet aéroport, toute la région a été l’objet, ces dernières années, d’une intense prospection immobilière. Une proportion très importante des parcelles agricoles a été vendue et des murs commencent à s’ériger un peu partout, en vue de constructions individuelles ou plus importantes, centrées sur le tourisme. De plus en plus de pistes qui permettaient d’y circuler librement sont maintenant coupées du fait de l’interposition de zones privatisées. Fort heureusement les Baobabs sont pour la plupart respectés (au Sénégal couper un Baobab est passible d’emprisonnement), et il y reste encore bien des zones d’intérêt naturaliste important.
Tout ce qui précède montre que les nuisances pour la faune sauvage s’accroissent. S’y ajoutent, comme dans le territoire de la Réserve Naturelle, des coupes importantes de bois sauvage (à l’exception des baobabs) dans les périodes d’inactivité agricole. Ce bois est utilisé comme combustible domestique, ou pour en faire du charbon de bois qui sera revendu.
Dans cette brousse, les observations sont principalement faites depuis la voiture, ainsi qu’à pied dans certaines zones (mettre des chaussures à semelle épaisse car on trouve par terre un peu partout des branches d’acacia, porteuses d’épines particulièrement longues et acérées). Pour l’instant on y observe toujours beaucoup d’oiseaux, incluant de nombreuses espéces de Passereaux, desChoucadors (Glossy starlings), deshuppes et des irrisors (Hoopoes and Wood Hoopoes) , des Calaos (Hornbills), des Tourterelles, Tourtelettes et des Pigeons (Doves, wood-doves and Pigeons) et un nombre important de rapaces ( raptors): Milans et Elanions (Kites), Crécerelles et autres faucons, Chicquera et Pèlerin (Kestrels and other Falcons), Circaètes (Snake-Eagles) , Autours (Goshawks) et quelques espéces plus spécifiques de ces espaces : Traquets (Wheatears andChats),Travailleurs (Queleas), Guêpiers ( Bee-eaters), Rolliers (Rollers), Courvites (Coursers). On y rencontre aussi souvent des Ecureuils de terre ou fouisseurs (Ground squirrels), des Singes Patas (Patas), et des Loups du Sénégal ( Senegalese wolfs). S’y ajoutent à la saison des pluies différentes espèces de Coucous (Cuckoos), ainsi que des Martin-Chasseurs du Sénégal et à tête grise ( Woodland and Grey-headed Kingfishers).
Dans la brousse de Somone et des villages environnants, nombre de sites à intérêt naturaliste n’ont pas de dénomination précise, ou bien celle-ci diffère selon les ethnies interrogées. Nous avons de ce fait baptisé certains lieux qui n’avaient pas de nom bien défini afin de nous y retrouver (voir carte ci-dessous). Ainsi la « zone du gros manguier » correspond à une zone de brousse occupée quelques mois de l’année par des travaux agricoles, et le reste du temps en friche, où se croisent plusieurs pistes. Cette zone héberge un énorme manguier qui abrite souvent les zébus de la région des ardeurs excessives du soleil, et un très vieux et beau Baobab couché (voir photos).
« La piste des Circaètes Jean Le Blanc, ou piste des CJLB » , qui correspond à l’extrémité Nord-Ouest de celle qui relie les villages de Thiafoura et Ngerigne, est la piste depuis laquelle nous avons pour la première fois observé un Circaète Jean Le Blanc au Sénégal, et c’est autour d’elle que nous continuons d’en observer le plus souvent. « La piste des Grues » est celle où nous avons découvert un petit groupe de magnifiques grues couronnées (photos) que nous avons pistées pendant plus de 18 mois avant de découvrir qu’il s’agissait d’oiseaux importés de Casamance élevés en semi-liberté par un habitant de La Somone ! Il n’y a pas de Grue Couronnée sauvage sur le territoire de la Réserve Naturelle de La Somone, et ces oiseaux ont disparu après 4 ans.
« L’abreuvoir de Thiafoura » se situe près de la berge Nord de la lagune. Il est centré par un puits duquel de jeunes bergers puisent l’eau avec laquelle ils remplissent une vieille baignoire. En fin de matinée les troupeaux de zébus convergent vers se point et s’abreuvent tour à tour longuement, offrant un spectacle très bucolique. « La piste de l’Autour sombre », que nous avons nommée d’après le couple d’autours sombres (Melierax Metabates) qui occupe cette zone, part de celle qui longe la lagune Nord au niveau de cet abreuvoir, pour rejoidre la piste reliant Guéreo à Popenguine, laquelle traverse à son départ le sommet de la péninsule de Guéreo. Dans la même zone, l’éco-lodge « les Manguiers de Guéreo » est adossé à une zone humide artificielle, et offre aussi plusieurs accès sur la lagune via des observatoires aménagès
El Toro est un très grand complexe touristique en chantier depuis une dizaine d’années. Outre un lodge de luxe, il présentera des chevaux de monte et différents parcs d’animaux captifs dont certains sont déjà présents. Cet ensemble se développe sur un très grand terrain au Nord de Somone, qui comprend beaucoup des plus beaux baobabs de la brousse.
La carte Google permet de situer Popenguine par rapport à La Somone, notre camp de base !
La petite ville côtière de Poponguine a été renommée Popenguine à l’initiative du Président Léopold Sédar Senghor dont elle était le lieu de villégiature favori. Il l’a ainsi louée dans son poème « Retour à Popenguine ». Il faut dire que tant sa plage que la haute falaise qui la borde en partie sont magnifiques. Elle est surtout connue pour le culte Marial qui y est pratiqué par les catholiques Sénégalais (10% de la population) et plus généralement de l’Afrique de l’Ouest (pèlerinage annuel à la basilique Notre Dame de la délivrance).
Comme La Somone, Popenguine est aussi devenue grâce à ses femmes un hot spot de la biodiversité sur la petite côte Sénégalaise. Outre son ouverture sur l’océan, une grande partie de la surface communale est occupée par une forêt qui a été classée en 1936. Ce classement ne l’a que très partiellement protégée de déboisements anarchiques entrepris pour récupérer du bois de chauffe. S’y sont associés les méfaits du surpâturage et ceux de plusieurs épisodes de sécheresse. C’est dans le but de réhabiliter la zone côtière de la commune que la Réserve de Popenguine a été créée le 21 Mai 1986.
Peu après, une association réunissant 129 femmes de la commune et un seul homme s’est constituée (officialisée en 1988) pour promouvoir la protection de la Nature locale. Elle a obtenu le soutien de la Fondation Nicolas Hulot. Aujourd’hui cette association continue de gérer la Réserve, ainsi qu’un campement où des repas peuvent aussi être servis sans y loger.
La Réserve occupe 1009 hectares. On peut la visiter moyennant un droit d’entrée de 2000 francs CFA. On peut aussi s’adjoindre le service d’un guide. Elle comporte une partie maritime incluant une frayère importante, et une partie terrestre (la seule visitée) qui s’étend jusqu’au village de Guereo. Dans cette partie terrestre, un plan d’eau qui se remplit à la saison des pluies, puis s’assèche progressivement, et un sentier de marche en terrain accidenté qui traverse une belle zone de savane de type Soudano-Sahélien très fleurie à la saison des pluies et un peu après.
Peu à peu quelques mammifères ont repris possession des lieux : un groupe de singe verts, des chacals correspondant plutôt, selon les études récentes, à des loups du Sénégal, des Porc-Epics, des Civettes. On ne voit guère que les premiers. On parle aussi d’antilopes et de hyènes mais nous n’en avons jamais vu depuis prés de 10 ans que nous visitons la Réserve.
Au plan ornithologique, de nombreuses Pintades de Numidie (celles qu’on mange en France depuis leur acclimatation) s’y sont réinstallées, quelques dizaines de Dendrocygnes veufs (White-faced whistling Duck, Dendrocygna Viduata) s’y reproduisent, ainsi que plusieurs autres espèces aquatiques et plusieurs espèces de Martin-Pêcheur et de Martin-Chasseur. On peut aussi y voir, bien sur surtout le soir mais parfois aussi de jour, tapis sous les buissons, et susceptibles de s’envoler s’ils sont dérangés l’Engoulevent à longue queue, et, plus rare, l’engoulevent à balanciers.
Dans le ciel on voit souvent d’Octobre à Février, sur ce site en bordure de mer, le Balbuzard pêcheur (Osprey, Pandion Haliaetus), mais aussi le Circaète Jean Le Blanc (Short-toed Snake Eagle, Circus Gallicus) et moins souvent, mais toute l’année, le Circaète Brun (Brown Snake Eagle, Circaetus Cinereus). Dans la savane, de nombreuses Tourterelles de plusieurs espèces, et de nombreux Calaos et Choucadors.
La Réserve est un très bon spot pour la Veuve à collier d’or(Sahel ParadiseWhydah, Vidua Orientalis), l’ Agrobate roux (Rufous-tailed Scrub-robin, Cercotrichas Galactotes), et le Traquet brun (Anteater Chat, Myrmecocichla Aethiops). Sa « spécialité » est le Bruant cannelle dont la sous-espèce locale a été rebaptisée depuis peu Bruant d’Alexander (Gosling’s Bunting, Emberiza Goslingi). On peut aussi y voir, bien sûr surtout le soir, mais parfois aussi le jour, tapis sous les buissons, ou s’en envolant silencieusement lorsqu’ils se sentent dérangés, l’Engoulevent à longue queue(Long-tailed Nightjar, Caprimulgus Climacurus), et, plus rare mais assez commun à Popenguine, l’Engoulevent à balanciers ( Standard-winged Nightjar, Caprimulgus Longipennis) (photos) .J’y ai aussi vu des poulettes de roche (Stone Partridge, Ptilopachus Petrosis).
Ci-après quelques photos d’oiseaux attrayants que nous avons rencontrés dans la Réserve de Popenguine avant le démarrage de ce site, et déjà publiées, comme la plupart de nos photos antérieures, sur le site www.oiseaux.net.
Vous pouvez aussi lire le compte-rendu de la visite de la Réserve de Popenguine du 20 Octobre 2018
Ainsi que celui de la visite du 3 Février 2020
et celui de la visite du 5 Mars 2023
Kaolack, chef-lieu de la région de Kaolack, est la cinquième ville du Sénégal par sa population (570000 habitants). Elle est située au Sud-Est de Dakar (distance 140km) et de Somone (157 km), à la croisée des chemins qui mènent via Kaffrine au Sud-Est du Sénégal (Tambacounda, Kédougou et le Parc National du Niokolo Koba), et via N’Dofan puis le nouveau pont Farafenni à la Gambie, et au delà à la Casamance.
La ville de Kaolack n’a pas beaucoup de charme, hormis le fait d’être construite sur le fleuve Saloum, et de constituer l’une des principales portes d’entrée de la région du Delta du Saloum et de son magnifique Parc National. On peut aussi aimer, et c’est notre cas, son extraordinaire (jugement personnel !) marché traditionnel quotidien, animé par une foule de locaux, qui s’enfonce dans des vieilles rues de la ville.
Grace à son port, la ville est aussi, de longue date, un centre d’acheminement et d’exportation de l’arachide produite dans la région, ainsi que du sel recueilli dans les marais salants qui longent le Saloum, et aujourd’hui de façon plus industrielle, dans la « Salt Production Area and Shipping » (zone de production d’expédition du sel) de la ville de Kaolack elle-même.
Mais en contrepartie, cette ville que d’aucuns ont surnommé Cradolack, est considérée, non sans raison, comme la ville la plus sale du Sénégal par l’accumulation de détritus et plastiques qu’aucun service de voirie ne semble ramasser. En réalité un comité d’habitants de la ville est en train d’organiser un service de « charrettes » pour lutter contre ce problème. Au Sénégal on qualifie de « charrette » les petites carrioles tirées par des chevaux ou plus souvent des ânes, qui assurent une grande partie des transports de matériaux, ainsi que le ramassage des poubelles lorsqu’il en existe un, et aussi le transport des personnes dans les régions rurales, voire celui des touristes comme autour de la lagune de la Somone (la charrette est alors rebaptisée « calèche » !).
L’intérêt naturalistique de cette région, dont on peut déjà se faire une bonne idée tout au long de sa traversée par la route reliant Kaolack à Sokone (lien avec photo carte Google 1), repose principalement sur 2 éléments :
- Avant tout, l’ile de Kousmar, située sur le territoire de la commune de Ndiaffate et délimitée par un méandre du Saloum et des marigots qui lui sont reliès. Cette ile de Kousmar est occupée par la forêt du même nom, et a la particularité d’héberger pendant une grande partie de notre hiver Européen un dortoir réunissant chaque soir des dizaines de milliers de petits rapaces, Faucons Crécerellette (Lesser Kestrel, Falco Naumanni) et Elanions Naucler (Scissor-tailed kite, Chelictinia riocourii), ces derniers observés beaucoup plus rarement que sur ce site.
Nous avons assisté plusieurs fois au spectacle extraordinaire du retour de ces oiseaux à leur dortoir. Après s’être acquis les services d’un jeune guide local au niveau de Ndiaffate Sérère ou de Ndiafatte Socé (en zone rurale, les villages sont constitués de hameaux nommés d’après l’ethnie des habitants qui s’y sont regroupés), et traversé non sans quelques difficultés la zone boueuse qui entoure le bras du Saloum, on traverse ce bras vers 16h sur une pirogue des plus rustiques, accroupi et se tenant à ses flancs, faute de siège.
A notre arrivée sur la tanne de l’ile de Kousmar, les premiers arrivés, des Elanions Naucler, sont déjà sur place, magnifiques oiseaux ressemblant à de grosses hirondelles blanches et gris argent, qui tournent longuement au-dessus de l’ile avant de se percher. Les Faucons Crécerellette commencent à arriver plus tard.
Peu à peu la masse des oiseaux grossit, ils grouillent dans le ciel et commencent à se poser sur de grands arbres, le plus souvent des baobabs, tout blancs par l’accumulation de leurs fientes. Régulièrement quelques oiseaux s’affolent, poussent un cri d’alarme, et plusieurs centaines sinon milliers s’envolent de leurs perchoirs dans un vacarme impressionnant, avant de progressivement revenir se poser sur les mêmes arbres.
On peut aussi revenir au dortoir en tout début de matinée. Généralement les Faucons Crécerellette sont déjà partis pour rejoindre leur territoire de chasse, car ce sont des lève-tôt. Mais si l’on n’a pas trop tardé, les Elanions Naucler sont encore sur leurs arbres qu’ils constellent comme des décorations de Noêl. Probablement sont-ils encore figés par le froid de la nuit, et ont-ils besoin d’une durée suffisante d’exposition au soleil pour recouvrer leurs forces et leur esprit, car tôt dans la matinée on peut les approcher de relativement prés sans qu’ils s’envolent.
On peut observer bien d’autres oiseaux sur l’ile de Kousmar, bien qu’on y vienne essentiellement pour les Crécerellettes et les élanions naucler. Nous y avons particulièrement remarqué des guêpiers d’ Orient, une espèce que nous n’avions jamais rencontrée plus au nord du Sénégal, ainsi qu’à plusieurs reprises, et la première fois avec l’aide de Simon Cavaillés, un rare Faucon de Barbarie.
Il est aussi possible de passer la nuit sur l’ile et d’y dormir à la belle étoile, ou sous une tente qu’on apportera, bien sûr sous le contrôle d’un guide. Cela donnerait une bonne chance d’y observer, ou au moins d’y entendre, des Hyènes tâchetées ( Spotted hyena, Crocuta, crocuta) et peut-être, avec énormément de chance, de voir un Serval ( Serval, Felis Serval), petit félin tacheté à queue courte, dont la présence inattendue sur l’ile n’a été révélée que récemment, par la pose de pièges photographiques. La survie de ces deux mammiféres sur l’ile de Kousmar, alors qu’ils ont été exterminés de la région environnante, s’explique par le caractère sacré de cette ile pour les villageois de Ndiaffate. Elle est inhabitée, et ils s’y rendent peu, uniquement le jour (l’activité des deux mammifères sus-décrits est essentiellement nocturne), et seulement pour y récolter des roseaux que beaucoup utilisent encore pour construire le toit de leurs habitations.
-Les autres éléments intéressants au plan naturaliste dans la région de Kaolack-Ndiafatte sont ses biotopes particuliers alternant tannes et zones humides, qui occupent la plus grande partie de sa surface, ainsi que la faune aviaire qu’ils hébergent. Ces éléments ne sont toutefois pas spécifiques de cette région puisqu’on les retrouve dans tout le delta du Saloum.
Ces zones humides sont le plus souvent rattachées aux multiples bras du Saloum, et dans ce cas remplies d’eau salée car deux fois par jour, à marée montante, la mer reflue dans le réseau fluvial du Saloum jusqu’à plusieurs kilomètres à l’intérieur des terres . Aux marigots salés que remplit ainsi régulièrement le fleuve s’ajoutent, pendant et quelques mois après la saison des pluies, des marigots d’eau douce, préférée par certains oiseaux comme les Cigognes noires.
Les tannes sont des étendues souvent vastes et généralement arides (tannes vives) faites de sable recouvert du sel laissé par le recul de l’eau salée à marée descendante. Nous avons abondamment illustré plus haut celles de Ndiafatte et de l’ile de Kousmar. C’est aussi sur ces étendues que sont installés les nombreux marais salants de cette région.
Dans les espaces humides de la région des tannes, on peut particulièrement observer, pour les oiseaux les plus courants, de nombreux Dendrocygnes veufs, des Oies de Gambie, des Pélicans blancs et des Pélicans gris, d’innombrables Hérons Garde-bœufs et Vanneaux du Sénégal ou éperonnés, des Aigrettes, de nombreux types de limicoles , des Echasses blanches et desAvocettes élégantes, ainsi que des Cigognes noires que nous avons plusieurs fois recherchées dans cette région au cours de leur migration hivernale afin de tenter d’en photographier les éventuelles bagues. On en observe plus particulièrement entre Kaolack et Ndiaffate. Cependant elles affectionnent les marigots non salés, et probablement pour cette raison disparaissent de la région lorsque ceux-ci s’assèchent à la fin de l’année.
La région est également riche en rapaces, et, outre les Elanions Nauclair et les Faucons Crécerellette et de Barbarie déjà mentionnés, nous y avons particulièrement observé quelques Faucons Kobez (Red-footed falcon, Falco vespertinus), des Aigles ravisseurs (Tawny eagle, Aquila rapax), plusieurs espèces de Circaètes dont un Circaète brun (Brown snake-eagle, Circaetus cinereus) et surtout, en Décembre 2015, un Circaète de Beaudouin (Beaudouin’ Snake-Eagle, Circaetus Beaudouini), beaucoup moins souvent rencontré, enfin plusieurs espèces de vautours dont le Vautour Charognard (Hooded vulture, Necrosyrtes monachus), le vautour plus souvent rencontré au Sénégal avec le Vautour Africain
Parmi les espèces peu courantes, nous avons aussi observé dans cette région des Bucorves d’Abyssinie (Abyssinian Ground Hornbill, Bucorvus Abyssinicus), ainsi que des Engoulevents à longue queue et, plus rare, des Engoulevents à balancier (Standard-winged Nightjar, Caprimulgus longipennis).
La Réserve de Fathala est une réserve privée située entre Toubacouta et la frontière de la Gambie (Karang). Elle a été créée en 2000 par un groupe Sud-Africain également impliqué dans la Réserve de Bandia (région de Thiès), et ouverte officiellement en 2003. Elle est enclose dans le Parc National du Delta du Saloum dans lequel elle occupe 6000 des 11800 hectares de la forêt classée de Fathala, qui constitue la partie terrestre du Parc National. Il s’agit d’une forêt sèche regroupant plus de 400 espèces végétales, dont d’impressionnants caïlcedrats qui peuvent atteindre 35 m de hauteur.
Fathala fait ainsi partie d’une zone riche en biodiversité classée site RAMSAR en 1984, c’est-à-dire zone humide d’importance internationale et protégée comme telle par la convention internationale de RAMSAR. Seuls 2000 hectares sont ouverts au public. Les actionnaires privés de cette Réserve travaillent en collaboration avec la Direction des Parcs Nationaux du Sénégal.
La Réserve héberge différents mammifères dont certains prospéraient dans la zone avant sa création (particulièrement phacochères,Cobes Defassa, hyènes tachetées, civettes et 4 espèces de singes : singes verts ou vervets verts,singes rouges ou Patas, Colobes bai, et Babouins ou singes rhésus).
On y trouve aussi d’autres espèces natives du Sénégal qui ont aujourd’hui disparu de la plus grande partie de son territoire. Initialement prélevées dans le Parc National du Niokolo-Koba, elles ont été transférées dans la Réserve privée de Bandia où elles ont fait souche. Quelques specimens ont ainsi pu être transférés ultérieurement à Fathala après l’ouverture de cette réserve et s’y sont à aussi reproduites : c’est particulièrement le cas de la belle Antilope rouanne, ou Hippotrague, dont le nom Sénégalais (Koba) apparait dans le nom du Parc national où elle fut prélevée (Niokolo-Koba). Également du Buffle de forêt, et de la sous-espèce occidentale de l’ Eland de Derby, la plus grande des antilopes, aujourd’hui menacée d’extinction. La Réserve de Fathala, comme celle de Bandia coordonnent le programme de conservation de cette espèce et se consacrent donc à la reconstitution de ses populations.
Enfin certaines espèces qu’on peut y rencontrer ne sont pas natives du Sénégal, et ont été importées d’autres pays Africains, particulièrement d’Afrique du Sud : Zébre des plaines, ou de Burchell, Giraffe, Rhinocéros blanc. On y trouve même 2 jeunes lions apprivoisés avec lesquels il est possible de marcher dans un espace réservé, moyennant finances !
Nous avons également pu constater l’intérêt ornithologique de la Réserve, particulièrement en matière de rapaces. Au cours de notre première visite, en 2015, nous avions particulièrement pu observer les Aigles martial et fascié, le Bateleur des savanes, le Shikra et l’Autour sombre, le Gymnogène, de nombreux Palmistes Africains, et plusieurs espèces de Vautours en 2 sorties de 2 à 3h. Mais d’autres visites ont été moins enthousiasmantes à cet égard..
Fathala offre un hébergement cher mais luxueux, sous la forme de vastes tentes disposées autour d’une clairière bordée d’arbres magnifiques, où évoluent en liberté certains des animaux de la Réserve, dont les Colobes bai.
ou depuis Juin 2019 RESERVE NATURELLE URBAINE DE LA GRANDE NIAYE DE PIKINE
Les Niayes (terme wolof) désignent la longue bande côtière reboisée de filaos dans les années 70 qui s’étend de Dakar à Saint Louis (180 km sur 20 à 30 km de largeur). Elles sont constituées de hautes dunes de sable fixées par les filaos qui protègent leur versant intérieur du vent et du sel marins. En bas des dunes, côté terre, de l’eau douce procurée par les pluies venant de l’océan s’est accumulée. Cet ensemble a permis le développement d’une végétation et d’une horticulture importantes, fournissant la plus grande partie des légumes et fleurs produits par le Sénégal.
La Grande Niaye de Pikine, constituée d’une telle dépression inter-dunaire où affleure la nappe phréatique, constitue particulièrement une zone humide à haute valeur agronomique au cœur de l’agglomération urbaine de Dakar. C’est dans cette zone que sont produits 80% des légumes, fleurs et plantes d’ornement alimentant les marchés de Dakar.
C’est aussi dans cette zone qu’a été implanté en 1996 le Technopôle de Dakar, dont la vocation est d’accueillir des centres de recherche et d’enseignement, ainsi que des entreprises développant l’innovation technologique. Le nom de Technopole a depuis été étendu à toute la zone, y compris maraichère.
Les ornithologues sénégalais n’ont pas tardé à remarquer la richesse ornithologique de la Grande Niaye de Pikine, qui comporte plusieurs lacs d’étendue variable en fonction des saisons et de l’abondance des pluies. Une mangrove s’est développée autour de ces espaces humides. La faune aviaire a fait l’objet de comptages réguliers depuis 2011, et le nombre des espèces qui y ont été répertoriées atteignait 239 fin 2022. L’espoir est donc né que cet espace soit sanctuarisé.
Cependant le développement d’une urbanisation sauvage dans cette zone impacte de plus en plus lourdement l’activité maraichère et celle des vendeurs de ses produits sur les marchés dakarois. Est particulièrement en cause la précarité foncière des exploitations cultivées (absence de documents de propriété enregistrés), qui facilite leur expropriation. La conjonction de cet impact sur la population locale, des menaces en résultant pour l’approvisionnement des marchés dakarois, et de la richesse faunistique de la zone, a conduit le gouvernement Sénégalais à classer en Juin 2019 toute le la zone du Technopole en « Réserve Naturelle Urbaine de la Grande Niaye de Pikine », protégeant du même coup les activités de maraichage et la faune occupant cette zone humide.
Vous pouvez lire les articles sur la Technopole de Dakar Pikine, devenu entretemps Réserve Naturelle Urbaine de la Grande Niaye de Pikine :